Portrait - Laines à l'Ouest
Solène Le Roux
Dans ma recherche de laines naturelles locales françaises pour la collection Terroir, je suis tombée sur la belle démarche engagée de Laines à l’Ouest. Ce collectif de bergères et passionnés des arts du fil est en train de créer une filière de la laine en Normandie, autour des races de mouton Avranchin, Cotentin, et des moutons qui grandissent sur les prés salés.
J’ai eu l’occasion de tricoter leur laine Accroche-Cœur pour créer le Col Aigrette et je n’ai pas été déçue ! La laine est d’excellente qualité, très douce pour une laine naturelle, bien ronde à tricoter et chaude à porter. Et puis elle garde bien la si agréable odeur du mouton.
J’ai le grand plaisir de vous présenter aujourd’hui Stéphanie et Marion, les deux fondatrices de Laines à l’Ouest, qui ont accepté de répondre à quelques questions pour nous parler de leur belle démarche.
Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots toutes les deux, nous présenter votre démarche, votre engagement et nous raconter comment est né Laines à l’Ouest ?
Laines à l'Ouest est une marque réunissant les compétences de passionnées de laine ! Éleveuse ou créatrice textile, ce qui nous lie est la conviction que le mouton est un formidable fil conducteur sur le territoire.
Est-ce que vous pouvez nous parler un peu des races de moutons normand, leurs spécificités et pourquoi c’est important pour vous de les préserver ?
La Normandie est le berceau de 3 races : l'Avranchin, le Cotentin et le Roussin de la Hague. Toutes trois en sauvegarde, elles représentent un patrimoine collectif précieux. L'Avranchin est historiquement reconnu la seconde meilleure laine de France après le Mérinos.
Nous sommes la seule dynamique à valoriser les toisons de races normandes !
Quelles sont les étapes de production de vos fils ?
Collecte et tri en mai-juin, puis envoi en laverie (Laurent laine) et filature (Terrade)
Pour le Col Aigrette, j’ai utilisé une pelote naturelle et une pelote teinte à la main par une teinturière végétale. Comment est née cette collaboration ? Est-ce que vous allez continuer à proposer des gammes teintes et éventuellement étendre votre palette ?
Dans la Manche, une botaniste d'origine turque se passionne pour la laine et les plantes tinctoriales, il nous est apparu une évidence de collaborer. Elle s'appelle Beste Bonnard.
Nous allons développer les couleurs, mais pas uniquement en pigments végétaux car le processus technique est très coûteux et peu homogène, ce qui rend impossible la réalisation d'un gros ouvrage. Nous faisons actuellement des essais avec des teintures conventionnelles écoresponsables.
Vous avez aussi lancé un fond de documentation autour de la laine normande et son histoire, qu’est-ce qui vous a poussé à lancer ce projet unique ? Est-ce que vous avez des contributions intéressantes pour l’instant ?
Cette initiative est née du constat que la Normandie souffre d'un déficit de mémoire sur le sujet "laine" (contrairement à la Bretagne par exemple, où ce savoir-faire et cet intérêt se sont transmis de génération en génération).
Dans le milieu rural, la notion de patrimoine immatériel est rarement perçue comme une richesse. Des trésors se retrouvent à la déchetterie (vieux livres agronomiques, matériel de tonte ancien,...).
Nous nous sommes également dit que pour poser le socle d'une nouvelle génération, il fallait leur proposer un fond local dans lequel puiser de l'inspiration et de la légitimité.
Enfin, quels sont vos projets en cours ou à venir à Laines à l’Ouest ?
En juillet, nous représentons les 3 races normandes au Championnat Mondial de Tonte (dans le 88)
Tout l'été, nous faisons des animations en Normandie, parfois liées au patrimoine, parfois au land-art, parfois aux reconstitutions historiques,... toutes les dimensions de lien au territoire nous passionnent !
Et à la rentrée, nous proposerons une fois par mois un cours d'initiation au crochet pour grands débutants